Depuis le Moyen Âge jusqu’aux dynamiques contemporaines, l’histoire de la Sécurité sociale et de l’économie sociale et solidaire (ESS) se tisse autour d’initiatives et de doctrines qui placent la solidarité au cœur de leurs préoccupations. Aujourd’hui, face à l’émergence de l’intelligence artificielle (IA) et de la robotique, l’humanité s’apprête à vivre une nouvelle révolution industrielle qui amène à repenser nos modèles socio-économiques. De la tradition des guildes à l’institutionnalisation de la protection sociale, et jusqu’aux idées de revenu universel, l’ESS se révèle un socle essentiel pour anticiper et accompagner ces transformations.
1. Un regard historique : de la solidarité médiévale à la Sécurité sociale
Des guildes au solidarisme
Les racines de l’économie solidaire remontent au Moyen Âge, époque où les guildes, confréries et compagnonnages jouaient déjà un rôle de protection et de soutien mutuel. Il s’agissait de communautés professionnelles (artisans, commerçants) organisées pour assurer l’apprentissage, la régulation de la production, mais aussi l’entraide en cas de maladie ou d’accident.
L’essor industriel au XIXe siècle s’est accompagné de nombreux mouvements et théories économiques. Les penseurs du socialisme utopique, tels que Charles Fourier ou Robert Owen, ont posé les bases d’une réflexion sur le travail, l’égalité et le partage des richesses. Parallèlement, le saint-simonisme et le solidarisme, portés par des figures comme Saint-Simon et d’autres philanthropes, ont contribué à l’idée que la richesse devait servir le bien commun.
La création de la Sécurité sociale comme jalon de justice sociale
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la France se dote de la Sécurité sociale (1945), dispositif destiné à protéger l’ensemble de la population. Inspiré par les mutuelles ouvrières et les premières caisses d’assurance, ce système incarne la traduction institutionnelle d’un idéal : celui de garantir un accès équitable aux soins, aux allocations familiales et aux pensions de retraite. Cet héritage de solidarité s’appuie sur une longue tradition d’associations, de coopératives et de mutuelles, perpétuant ainsi l’esprit des anciennes pratiques d’entraide médiévales et révolutionnaires.
2. L’émergence historique des économies solidaires
De la loi Le Chapelier (1791) à la révolution industrielle
La loi Le Chapelier de 1791, qui interdisait dans un premier temps les corporations et confréries, a paradoxalement précipité la naissance de nouvelles formes d’associations ouvrières. Privés de leurs anciens repères corporatifs, les travailleurs se sont organisés pour lutter contre l’insécurité du quotidien, donnant naissance aux premières sociétés de secours mutuel et aux mutuelles de santé.
Les mutuelles, réponse à l’insécurité sociale
Avec l’industrialisation, la précarité et les accidents du travail se sont multipliés. Les mutuelles ont ainsi constitué une première réponse concrète et structurée, proposant aux ouvriers un système de cotisations partagées pour faire face aux aléas de la vie. Leur logique de solidarité – la mise en commun des ressources au profit de tous – restera un pivot fondateur de l’économie sociale et solidaire.
Naissance du solidarisme
Au tournant du XIXe et du XXe siècle, le solidarisme prend forme comme une doctrine prônant la redistribution équitable et la justice sociale. Il s’agissait de penser la collectivité comme un ensemble d’individus interdépendants, où chacun est redevable aux autres et inversement. Ces idées ont soutenu la mise en place de politiques publiques axées sur la protection sociale et la lutte contre les inégalités.
3. Vers l’économie sociale et solidaire (ESS) : un héritage vivant
L’ESS, entre passé et présent
L’économie sociale et solidaire, telle qu’on la connaît aujourd’hui, est l’héritière de ces dynamiques historiques. Elle regroupe plusieurs formes d’organisations – associations, coopératives, mutuelles et fondations – qui partagent des principes communs : la primauté de l’humain sur le capital, une gestion démocratique et une finalité d’intérêt général.
Le rôle central des mutuelles
Les mutuelles – dont certaines sont issues directement des premiers syndicats de secours ouvriers – jouent un rôle majeur dans le financement et la structuration de l’ESS. Leur capital social est souvent réinvesti dans des projets à impact territorial, social et environnemental. Par exemple, le Groupe VYV, présidé par Stéphane Junique, illustre bien cette volonté de conjuguer performance économique et solidarité, notamment dans les domaines de la santé et de la prévoyance.
Le cadre législatif et la loi Hamon
Sous l’impulsion de Benoît Hamon, la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire (souvent appelée « loi Hamon ») a consolidé la reconnaissance institutionnelle de ce secteur. Ce texte a clarifié les statuts juridiques des entreprises de l’ESS et renforcé leur visibilité auprès des pouvoirs publics. Les structures bénéficiant de ce cadre législatif peuvent ainsi être reconnues « entreprises de l’ESS », ce qui facilite la mobilisation de fonds, la mise en réseau et l’essaimage de leurs bonnes pratiques.
4. L’ESS au service des territoires et des citoyens
Une dynamique locale
L’ESS s’épanouit particulièrement à l’échelle locale. Coopératives agricoles, ressourceries, épiceries solidaires ou chantiers d’insertion : toutes ces initiatives ancrent une économie circulaire et solidaire dans le tissu de la ville ou de la région. L’objectif : favoriser le développement endogène, en créant de l’emploi et de la valeur ajoutée qui restent sur le territoire.
L’Europe comme levier d’action
Au-delà des frontières nationales, l’Europe soutient activement des programmes dédiés à l’ESS et à l’économie circulaire. Les projets transnationaux de coopération entre mutuelles et coopératives ouvrent la voie à de nouvelles solidarités et à des financements innovants. De nombreux fonds structurels encouragent d’ailleurs le développement de circuits courts et d’initiatives éco-responsables au sein des États membres.
Réinvestir les bénéfices pour le « mieux-vivre »
La spécificité de l’ESS réside dans le fait que les bénéfices ne sont pas accaparés par des actionnaires, mais réinvestis dans l’activité ou dans la communauté. C’est ce « cercle vertueux » de réinjection des profits dans l’économie locale et sociale qui nourrit l’idée d’une société plus équitable et plus durable.
5. IA, robotique et transformations sociales : la nouvelle révolution industrielle
Des technologies en plein essor
L’intelligence artificielle et la robotique sont en train de bouleverser l’organisation du travail et les modes de production. Comme lors des précédentes révolutions industrielles, des emplois vont se transformer ou disparaître, tandis que de nouvelles compétences et de nouveaux métiers vont émerger. Le défi n’est pas seulement technique, mais aussi social et politique : comment répartir la valeur créée par ces innovations ? Qui en sera bénéficiaire ?
Vers un revenu universel ?
Face au risque de précarisation et de polarisation du marché de l’emploi, l’idée d’un revenu universel (ou revenu de base) revient régulièrement sur le devant de la scène. Benoît Hamon, entre autres, a porté cette proposition au cœur du débat public en France, soulignant la nécessité de revisiter nos modèles de redistribution et de protection sociale. Ce projet implique de repenser la façon dont nous finançons la solidarité nationale et de consolider les missions de l’ESS.
Anticiper plutôt que subir
Des acteurs comme Stéphane Junique, à la tête du Groupe VYV, ou la Fondation Jean Jaurès, s’attachent à promouvoir une réflexion collective sur les enjeux de cette transformation. La question n’est plus seulement de corriger a posteriori les effets néfastes de l’automatisation, mais bien d’anticiper les changements pour construire une économie soutenable et solidaire, au service de l’humain.
6. Les acteurs du changement : initiatives et visions
Stéphane Junique (Groupe VYV)
À la tête du premier groupe mutualiste de santé et de protection sociale en France, Stéphane Junique plaide pour que les enjeux de santé publique et de solidarité restent au centre du débat autour de la révolution numérique. Sa vision : l’intelligence artificielle et la robotique doivent être mises au service de l’humain, afin d’améliorer la qualité de vie, plutôt que de réduire la solidarité et la cohésion sociale.
Benoît Hamon et l’ancrage politique
Ancien ministre délégué à l’Économie sociale et solidaire et à la Consommation, Benoît Hamon a joué un rôle clé dans la reconnaissance légale de l’ESS, tout en ouvrant la voie à l’idée d’un revenu universel. Sa démarche illustre l’importance pour les décideurs politiques de s’emparer de ces problématiques afin de proposer des cadres d’action innovants.
La Fondation Jean Jaurès et d’autres think tanks
Des organisations de réflexion comme la Fondation Jean Jaurès, mais aussi de nombreux laboratoires d’idées (think tanks) en France et en Europe, travaillent à forger des propositions pour intégrer les enjeux de la transformation numérique dans une refonte globale de notre modèle social. Ils encouragent la concertation entre pouvoirs publics, entreprises, partenaires sociaux et citoyens, pour inventer les mécanismes adaptés à la « nouvelle révolution industrielle ».
Conclusion : se préparer à une transformation collective
L’histoire de la solidarité, depuis les guildes médiévales jusqu’aux mutuelles d’aujourd’hui, montre que les révolutions industrielles sont toujours accompagnées de nouveaux mouvements sociaux et de nouvelles théories économiques. L’ESS, fruit de cette histoire, s’avère particulièrement adaptée pour répondre aux enjeux actuels et futurs : elle met l’humain au centre, promeut la coopération et réinjecte les bénéfices dans l’intérêt collectif.
À l’aube d’une révolution industrielle portée par l’intelligence artificielle et la robotique, il est urgent de structurer une économie capable d’amortir les chocs sociaux et d’ouvrir des perspectives positives pour l’ensemble de la société. Mobiliser les forces mutualistes, coopératives et citoyennes est plus que jamais indispensable : cette démarche collective d’anticipation permettra d’inventer les modèles de demain, résilients et solidaires.
En somme, la tradition de l’ESS nous rappelle que l’économie n’est pas qu’une affaire de chiffres et de marchés : elle est aussi une affaire d’humanité et de justice. La prochaine décennie sera décisive pour forger des institutions et des cadres aptes à canaliser le potentiel de l’IA au profit du plus grand nombre. C’est à cette condition que la « nouvelle révolution industrielle » pourra devenir le levier d’un mieux-vivre pour tous.
Pour aller plus loin
• Stéphane Junique, Groupe VYV : discours et tribunes disponibles sur le site du groupe, illustrant la volonté de lier innovation technologique et solidarité.
• Benoît Hamon : son travail législatif et ses propositions sur le revenu universel et l’ESS, consultables via ses interventions publiques.
• Fondation Jean Jaurès : publications et études approfondies sur la transformation des modèles économiques et sociaux.
• Loi n°2014-856 du 31 juillet 2014 : un socle législatif clé pour comprendre l’économie sociale et solidaire en France.
N’hésitez pas à compléter avec des données chiffrées, des témoignages d’acteurs locaux de l’ESS ou des exemples concrets de projets combinant IA et initiatives solidaires, afin d’illustrer la vitalité et la diversité de ce secteur.